Souveraineté Numérique : Entretien croisé
Nokia - VR Connection

Extrait #4 : Développement des infrastructures

Pierre-Gaël Chantereau
Président-Directeur Général

Nokia France

Pierre-Gaël Chantereau,Président-Directeur Généralde Nokia France

Alexandre Ibanez
Président
GIE VR Connection 

Alexandre Ibanez, Président du GIE VR Connection

Quelles sont vos perspectives sur le développement des infrastructures, en particulier en termes de collaboration et de partenariat ?

Pourriez-vous partager vos réflexions sur la possibilité de collaborer avec des acteurs fiables dans ce domaine ?

Alexandre Ibanez

Nous sommes contraints à la collaboration, c’est une nécessité pour nous.

La coopération et la concertation sont inévitables dans notre domaine. À notre échelle, dans le domaine des technologies immersives, nous avons déjà fait front commun. Il était essentiel pour nous d’avoir un poids significatif, car, comme mentionné précédemment, avant que les données ne circulent dans les réseaux, elles passent par des dispositifs construits par des constructeurs. Afin d’influer sur ces constructeurs, il est impératif de ne pas agir seul, mais plutôt de se regrouper avec d’autres acteurs.

Dans le contexte des besoins en infrastructures, nous nous trouvons dans une situation similaire. Nos clients actuels sont l’Education Nationale, le système de santé et de grands industriels français. Nous nous alignons sur leurs demandes et tentons de répondre à leurs attentes, ce qui nous permet de collaborer étroitement dans la co-construction de solutions.

Il est crucial d’avoir un poids significatif lors des négociations avec les constructeurs Américains et Chinois (tels que Meta). Si nous nous présentions seuls, la discussion serait difficile et déséquilibrée.      Notre poids se situe du côté de nos utilisateurs, de nos données et des dépenses financières que nous engendrons. Cela revêt une importance considérable, surtout en considérant le PIB généré par l’Europe, en comparaison notamment avec les États-Unis.

Pierre-Gaël Chantereau 

Nous adhérons pleinement à une approche de collaboration B2B afin de répondre aux besoins de nos clients. Dans notre domaine du métavers industriel, caractérisé par la digitalisation et la numérisation en temps réel des systèmes manufacturiers et logistiques, un besoin croissant en infrastructures dédiées se manifeste. Cela inclut une extension du réseau au-delà de la couverture traditionnelle en point d’accès fixe ou en 5G, nécessitant des partenariats clés.

Pour Nokia, les opérateurs sont des partenaires évidents et cruciaux pour étendre les infrastructures. En collaboration, nous mettons actuellement en place des instances réseau, du Slicing, pour créer des réseaux dédiés en capacité, temps de latence ou criticité, à l’échelle régionale voire plus vaste, en coopération avec les opérateurs. Ces infrastructures font l’objet de tests de sécurité et de sûreté approfondis.

Au-delà des aspects réseau, les intégrateurs de solutions informatiques, anciennement SSII, s’ajoutent fréquemment à ces partenariats. Ils contribuent à la création de solutions business en prenant en compte les changements industriels, les processus de conception de valeur et l’impact du réseau.

Nous ouvrons notre technologie, notamment dans le domaine de la 5G, pour travailler avec des partenaires tels que Microsoft et HP, cherchant à simplifier les solutions tout en maintenant des niveaux de qualité élevés dans le respect des contraintes réglementaires européennes. Il y a une cocréation dans le « Go to Market », la conception de la solution, et la création d’un environnement business pour la transformation vers un métaversindustriel, dépassant ainsi les frontières de Nokia.

Donc c’est vraiment aujourd’hui, dans notre ADN, d’embrasser ces enjeux en mode coopératif. Nous ne pouvons pas juste proposer une solution de réseau, ça ne crée pas un business model pour nos clients.

Alexandre Ibanez

Pour compléter le propos de Pierre-Gaël, je constate actuellement une tendance parmi de nombreux industriels qui déploient des réseaux fermés utilisant la technologie 5G à l’intérieur de leurs usines. Cette approche vise à établir des réseaux non connectés à l’ensemble de leur infrastructure globale, offrant une protection significative et résolvant diverses problématiques.

Jusqu’à récemment, la limitation de débit sur ces infrastructures fermées constituait un obstacle à la mise en place d’infrastructures de type métavers industriel. Cependant, la 4G et la 5G ont permis de surmonter cette limitation.

Dans notre collaboration avec de grands industriels de la région Auvergne Rhône Alpes, nous constatons l’utilisation de solutions réseau 5G fermées à l’intérieur de l’entreprise. Cette approche permet de contrôler efficacement chaque machine sans avoir de connexion externe ni de lien avec le système d’information global de l’entreprise. Bien que la protection totale soit difficilement atteignable, la stratégie consiste à rendre le coût d’acquisition et de vol de données non rentable pour d’éventuels Hackers.

Cette transition vers des réseaux plus restreints, gérant des quantités importantes de données tout en les isolant les unes des autres, semble pouvoir décourager les attaques. Certains industriels ont déjà adopté cette approche, mais elle demeure sporadique. En tant que fournisseur de solutions et utilisateur de dispositifs connectés, nous sommes confrontés à la nécessité de conseiller et de sensibiliser les DSI sur la mise en place de réseaux privés fermés.

Etant très présent dans le secteur industriel français, je pense que Nokia doit sensibiliser davantage ces acteurs industriels.